Dieudonné Disi, 26 ans, a donné hier à Lyon un récital de 21,1 km. Incroyable d'aisance et de relâchement, le Rwandais de Ntyazo-Butarg a fait voler en éclat le gros bataillon des athlètes de l'armée - qui ne sont pourtant pas les premiers venus - dès le deuxième kilomètre. Une attaque au train, en relais de John Kyui (alias John Kinross), suffisait à éliminer le légionnaire auteur en 2006 du doublé 20 km de Paris - Marseille-Cassis et le chasseur alpin James Theuri ex-champion de France de semi-marathon Après cinq kilomètres de course, à la sortie du parc de la Tête d'Or, Disi reléguaient déjà les deux « bidasses » à trente secondes ! Il passait au panneau des dix bornes en 28'54'' (!), lancé sur les bases d'une heure de course. Il prenait ensuite le temps d'admirer sa belle foulée dans le reflet des vitrines du centre-ville, avant de devoir ralentir la cadence. Si le parcours a sans nul doute gagné en fluidité, ce n'est toujours pas du billard. Les nombreuses relances sur une chaussée humide incitaient hier matin à la prudence, sans parler du périlleux chassé-croisé avec la queue du paquet sur les berges du Rhône au retour vers la Tête d'Or. Disi en profitait pour lancer des petits signes de la main à la masse des 4 500 participants (record battu) Dans la confusion, la moto du directeur de course allait partir en glissade (heureusement sans mal). Le couac n'a pas échappé à l'observateur dépêché par la fédération (FFA) pour juger de la candidature du semi-marathon de Lyon pour l'organisation des championnats de France 2008
Futur légionnaire ? Du coup, Disi se « contentait » d'assurer la victoire en 1h01'54'', histoire de rafler la prime de 2000 euros attribuée en cas de chrono inférieur à 1h02'', en plus des 1 000 euros promis au vainqueur. Le Rwandais doit de toute façon se montrer comptable de ses efforts. Présent aux Mondiaux d'Osaka (élimination en série du 5 000 m), il a depuis enchaîné en moins de 24 heures une 6e place au meeting Golden League de Bruxelles (27'22''28) et la victoire au 10 km de Roanne (28'43'') «A trois semaines des championnats du monde de course sur route à Udine (14 octobre), je ne pouvais pas me permettre de courir à fond, disait-il hier. Aujourd'hui, j'ai pu tester mes forces. Il me restera à effectuer une grosse séance mercredi, mais je pourrai aller en Italie confiant. Je pense qu'une cinquième place est possible ! » Installé à Rodez, ce grand ami du Burundais de l'AS Rispoli-Villeurbanne Egide Manirakiza, chez qui il logeait depuis les 10 km de Roanne, incarne le demi-fondeur typique de la région des grands Lacs africains. Coaché par un Dunkerquois et managé par un Anglais, il s'époumone, quoi qu'il en dise, à courir le cachet. Des contacts ont été noués avec la Légion étrangère. « Pas mal de monde tourne autour de lui, on attend sa réponse », raconte le chef de section de l'Athleg, Pascal Jannot, qui estime « que vu son talent, il devrait peut-être moins se disperser ». Disi en est encore à s'interroger : « On verra », dit-il. Il n'ignore pas qu'en cas d'incorporation dans la légion, il devrait renoncer aux Jeux de Pékin où il se serait bien vu disputer le marathon en cas de test concluant à Londres ou à Rotterdam au printemps prochain. L'équipe de France, quant à elle, récupérerait un gros talent.
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